Les fistules caroticocaverneuses (FCC) représentent une communication anormale entre la circulation carotidienne et le sinus caverneux. Elles peuvent être classées comme directes ou indirectes qui sont des conditions distinctes avec des étiologies différentes.

Epidémiologie

Les CCF directes sont souvent secondaires à un traumatisme, et à ce titre la démographie reflète la distribution des traumatismes crâniens, le plus souvent observés chez les jeunes patients masculins. La présentation est aiguë et les symptômes se développent rapidement.

En revanche, les CCF indirects ont une prédilection pour les patientes ménopausées et le début des symptômes est souvent insidieux.

Les autres conditions qui prédisposent à un risque accru comprennent :

  • Syndrome d’Ehlers-Danlos
  • Dysplasie fibromusculaire

Présentation clinique

  • exophtalmie pulsatile : ~75% 3
  • chémose et hémorragie sous-conjonctivale
  • proptose
  • perte visuelle progressive : 25-32% 3
  • acouphènes pulsatiles (généralement objectifs)
  • hausse de la pression intracrânienne
  • hémorragie sous-arachnoïdienne, hémorragie intracérébrale, otorrhagie, épistaxis : ~5% 3
  • palissades des nerfs crâniens (III, IV, Vc, VI)5

Pathologie

Classification

Les fistules carocaro-caverneuses peuvent être classées en fonction de différentes caractéristiques:

  1. écoulement : haut débit vs bas débit
  2. étiologie : spontanée vs traumatique
  3. anatomie vasculaire

Parmi celles-ci, l’anatomie vasculaire est la plus fréquemment utilisée et divise le plus largement les fistules caroticocaverneuses en deux types principaux:

  • directes : communication directe entre l’ICA intracaverneuse et le sinus caverneux
  • indirecte : la communication existe via des branches de la circulation carotidienne (ICA ou ECA)

La classification de Barrow des fistules caroticocaverneuses caractérise en outre les fistules en fonction des caractéristiques angiographiques :

  • type A : connexion directe entre l’artère carotide interne intracaverneuse et le sinus caverneux
  • type B : shunt dural entre les branches intracaverneuses de la carotide interne et le sinus caverneux
  • type C : shunts duraux entre branches méningées de l’artère carotide externe et sinus caverneux
  • type D : type B + type C
Pathophysiologie
Directe (Barrow type A)

Une fistule directe est due à une communication directe entre l’artère carotide interne intracaverneuse et le sinus caverneux environnant. Il existe un certain nombre de causes, cependant, la rupture d’anévrisme et les traumatismes sont de loin les plus fréquents :

  • anévrisme de l’artère carotide intracaverneuse rompu
  • traumatisme (y compris chirurgie/angiographie)
  • autres causes incluent
      .

    • syndromes de déficience en collagène
    • dysplasie fibromusculaire
    • disséction artérielle
Indirecte (types de Barrow B, C, D)

Les fistules indirectes sont dues à la communication par de multiples branches entre les artères carotides internes et/ou externes et le sinus caverneux. Les plus fréquentes sont de type C, avec des branches méningées de la carotide externe formant la fistule 3.

Elles sont postulées comme étant secondaires à une thrombose du sinus caverneux avec revascularisation et sont donc similaires aux fistules artério-veineuses durales ailleurs. D’autres facteurs prédisposants semblent être la grossesse, les procédures chirurgicales dans la région et la sinusite 3.

Caractéristiques radiographiques

CT

L’angiographie CT est la modalité d’imagerie non invasive de choix pour l’évaluation de la fistule caroticocaverneuse suspectée 9. Les caractéristiques incluent

  • congestion orbitale
    • proptose/exophtalmie
    • étranglement/œdème graisseux rétrobulbaire
    • élargissement des muscles extra-oculaires
  • engorgement et rehaussement veineux 10
    • Veine ophtalmique supérieure élargie
    • . veine
    • sinus caverneux bulging
    • rehaussement asymétrique du sinus caverneux avec une atténuation similaire à celle de l’artère carotide interne et supérieure à celle du sinus transverse
  • déshiscent de l’artère carotide interne (pour les fistules de type direct) : Aspect en bonhomme de neige du tractus fistuleux impliquant l’artère carotide nourricière et la poche veineuse drainante 10
  • Hémorragie intracrânienne due à une rupture de la veine corticale
Angiographie (DSA)

L’angiographie par soustraction numérique sur cathéter est la technique d’imagerie de référence en raison de sa résolution spatiale et temporelle supérieure.

  • synchronisation rapide de l’artère carotide interne au sinus caverneux
  • veines drainantes hypertrophiées
  • écoulement rétrograde du sinus caverneux, le plus souvent dans les veines ophtalmiques
Ultrasons
  • des veines ophtalmiques artérialisées peuvent être vues sur une étude Doppler

Traitement et pronostic

L’histoire naturelle des fistules caroticocaverneuses est très variée, allant de la fermeture spontanée à des symptômes rapidement progressifs. En tant que tel, la thérapie est pareillement variable allant d’une gestion conservatrice expectative à une intervention endovasculaire ou chirurgicale émergente.

Gestion conservatrice

Comme une proportion de fistules caroticocaverneuses à faible débit se ferment spontanément, une gestion conservatrice initiale des symptômes oculaires est souvent employée en premier lieu à condition qu’aucune caractéristique à haut risque (par exemple, anévrisme des vaisseaux d’alimentation) ou complications oculaires ou intracrâniennes graves ne soient présentes 6.

Traitement par compression carotidienne

En plus des mesures conservatrices, la compression carotide-jugulaire (au niveau du bulbe carotidien) peut être utile dans le traitement des fistules indirectes entraînant une fermeture dans jusqu’à 30% des cas, vraisemblablement en raison d’une thrombose progressive due à une stagnation intermittente du sang adjacent au caillot existant. En revanche, elle ne réussit que dans 17% des fistules directes, probablement en raison du débit plus élevé à travers un défaut plus grand 3. Il est important que la maladie athérosclérotique de la bifurcation carotidienne soit exclue avant le début de la compression 6. Les patients sont instruits de comprimer le bulbe carotidien pendant 10 secondes quatre à six fois par heure 6. La compression doit être effectuée avec la main controlatérale de sorte que si une ischémie hémisphérique symptomatique se produit, la paralysie transitoire entraîne l’arrêt de la compression.

Endovasculaire

La prise en charge endovasculaire est le pilier du traitement pour les patients qui échouent ou ne sont pas adaptés à la prise en charge conservatrice et à la thérapie par compression 6.

Deux approches principales sont disponibles, en fonction de l’anatomie de la fistule : embolisation transartérielle ou embolisation transveineuse.

Fistules directes

Le traitement des fistules directes nécessite l’occlusion de la déchirure de l’artère carotide interne. Ceci peut être réalisé de différentes manières 6 :

  • Stent couvert transartériel de flux-.placement dans l’artère carotide interne 7
  • placement transartériel d’un ballon détachable à travers le défaut dans le sinus caverneux
  • bobine transartérielle ou transveineuse ou autre matériel embolique placé à travers le défaut oblitérant le sinus caverneux
  • occlusion transartérielle de l’artère carotide interne
Fistules indirectes

Les fistules indirectes nécessitent soit une occlusion transartérielle des branches artérielles d’alimentation et/ou une occlusion transveineuse du sinus caverneux 6. L’accès transveineux peut être difficile et peut nécessiter un accès par la veine ophtalmique supérieure (parfois à l’aide d’une exposition chirurgicale), la veine ophtalmique inférieure, le plexus ptérygoïdien latéral, le sinus pétreux supérieur 6. Occasionnellement, des stents de déviation de flux peuvent être utilisés pour traiter les fistules indirectes si aucune autre approche transartérielle ou transveineuse n’est disponible 8.

Chirurgical

Le traitement chirurgical est relégué dans la plupart des institutions pour les cas où la gestion endovasculaire est infructueuse ou impossible. Le traitement peut impliquer la ligature ou le piégeage des segments artériels impliqués 3

Complications

L’hémorragie spontanée peut être une hémorragie sous-arachnoïdienne, une hémorragie intracérébrale ou une hémorragie extracrânienne (par exemple épistaxis ou otorrhagie).

Les complications oculaires sont également fréquentes et constituent souvent l’un des facteurs déterminants dans l’engagement d’un traitement.

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