RAPPORT DE CAS
Une femme de 24 ans s’est présentée au service des accidents et des urgences avec une histoire de surdosage, prenant 92 propanolol LA 80 mg, 45 paroxétine 30 mg et 28 comprimés de diazépam 5 mg, deux heures avant l’admission. Le NPIS nous a conseillé d’administrer du charbon actif toutes les quatre heures et de surveiller étroitement les signes vitaux et, si nécessaire, d’administrer du glucagon par voie intraveineuse. Cependant, dans les 30 minutes suivant son arrivée, son score de coma de Glasgow s’est rapidement détérioré et elle a développé une hypotension. Les mesures des gaz du sang artériel ont révélé une acidose métabolique et lactique. Son état s’est rapidement détérioré et elle a fait un arrêt cardio-respiratoire. Elle a été intubée et les directives standard de l’ALS ont été suivies. De plus, le NPIS a été contacté et a conseillé ce qui suit : (1) 100 μl de bicarbonate de sodium à 8,4 % pour corriger l’acidose, (2) une perfusion d’isoprénaline pour augmenter la fréquence cardiaque, (3) une perfusion d’adrénaline (épinéphrine) pour augmenter la pression artérielle, (4) une perfusion de glucagon pour contourner le β-bloc et agir directement sur le GMP cyclique,1 (5) des fluides intraveineux pour assurer un remplissage adéquat.
Malgré cela, le patient a continué à faire des arrêts intermittents, principalement des PEA (5 PEA, 1VT, 1VF). Le tracé ECG a montré un élargissement marqué du complexe QRS. Les périodes d’arrêt devenaient plus longues et l’intervalle entre elles plus court. Le NPIS a été contacté à nouveau et a conseillé une correction rapide du pH artériel à 7,5. Un bolus de 300 ml de bicarbonate de sodium à 8,4 % a donc été administré. Le débit cardiaque a été rétabli et l’ECG est revenu à une morphologie complexe étroite avec un sodium de 150 mmol. Elle a été transférée à l’unité de soins intensifs et s’est complètement rétablie.
Le propanolol est le bloqueur des canaux sodiques le plus puissant parmi les β-bloquants. Les canaux sodiques jouent un rôle important dans le développement du potentiel d’action dans le muscle cardiaque. La bradycardie provoquée par un surdosage de β-bloquants dans des cœurs normaux est due à un blocage des canaux sodiques plutôt qu’à un blocage β.2,3 Le traitement d’un surdosage de β-bloquants par un faible taux de K+ extracellulaire et un taux élevé de Na+ extracellulaire a permis d’augmenter la fréquence cardiaque et de restaurer la capacité de stimulation, inversant ainsi la toxicité dans des cœurs de rats isolés.4 Des expériences similaires ont été réalisées sur des chiens mais aucun rapport de ce type de traitement n’a été rapporté chez l’homme. Il s’agit du premier cas rapporté démontrant l’importance d’une surcharge en sodium pour contrecarrer le blocage des canaux par un surdosage en β-bloquants.